Entretien avec Augustin Ferté, Président de l’association du cinéma Jeanne Moreau à Saint-Just-en-Chaussée et partenaire engagé de Cinémas en mouvement

À l’occasion du lancement de Cinémas en mouvement, nous avons rencontré Augustin Ferté, Président de l’association du cinéma Jeanne Moreau à Saint-Just-en-Chaussée. Déjà associé aux réflexions en amont du projet, son établissement fait aujourd’hui partie des premiers cinémas engagés dans la démarche.

Dès l’écriture du projet, nous vous avions sollicité en tant qu’ancien professionnel des mobilités et responsable actif d’un cinéma, afin de comprendre comment vous appréhendiez cette problématique pour votre établissement. À l’époque, vous étiez déjà en train de mettre en place, avec votre collectivité, un dispositif de covoiturage. Pourquoi ce projet, et où en est-il aujourd’hui ?

C’est vrai que les choses prennent du temps, mais nous avançons. Deux raisons principales m’ont conduit à lancer ce projet de covoiturage. La première, c’est mon ancien métier : aujourd’hui retraité, j’ai longtemps travaillé dans la région sur les transports ferroviaires et les transports en commun. J’ai donc une connaissance assez large des questions de mobilité.

La deuxième, c’est que la mobilité constitue un frein majeur à la fréquentation des cinémas en milieu rural. C’est un obstacle, en particulier pour les jeunes isolés des loisirs. En discutant avec eux dans le cadre de nos actions, j’ai compris qu’au-delà de la contrainte pratique, il existe un frein psychologique. Ne pas pouvoir se déplacer crée une forme de renfermement, une habitude de ne plus bouger.

Vous diriez donc que la mobilité devient aussi un obstacle psychologique ?

Oui, même si des solutions existent. Mais certains restent bloqués sur l’idée que ce n’est pas pour eux, que ce n’est pas accessible. L’absence de mobilité devient presque une culture. Et pourtant, nous menons depuis longtemps une politique d’animation dynamique, encore plus depuis l’arrivée de notre médiateur. Nous allons chercher les jeunes grâce à des actions avec des associations locales et caritatives, des sorties collectives… L’idée est de leur donner goût à la sortie cinéma et l’envie d’y revenir.

Comment vous organisez-vous pour mener ces actions et identifier les besoins ?

Nous avons commencé par objectiver les choses à travers une enquête auprès de nos spectateurs. Nous avons constaté que la moitié venait de Saint-Just-en-Chaussée, à 95 % à pied, et l’autre moitié des communes alentours, à 90 % en voiture. Un quart du public se disait intéressé par le covoiturage, autant pour devenir conducteur que passager. C’est une base qui peut permettre de lancer une dynamique. Mais la mise en relation reste compliquée : il faut aligner le film, le jour, l’horaire et la localisation.

Grâce à cette enquête, avez-vous suffisamment de données pour constituer un premier groupe de covoitureurs ?

Il faudra aller plus loin, et c’est là que votre enquête dans le cadre de Cinémas en mouvement va nous être très utile : affiner la localisation, mieux comprendre les usages et réaliser notre bilan carbone. Je vais porter ce diagnostic, accompagné d’un service civique dont la formation porte justement sur ces questions.

Comment travaillez-vous avec votre collectivité sur ce projet ?

Notre communauté de communes est autorité organisatrice de la mobilité. Je travaille donc en direct avec la personne en charge du sujet. Nous nous connaissons de longue date, mais l’important est qu’ils développent actuellement un réseau « Pouce », associé à un réseau senior pour les plus de 60 ans, dont certains sont des volontaires. Pour l’instant, cela fonctionne surtout pour aller faire des courses ou se rendre à la pharmacie, mais le projet évolue dans le bon sens.

Ils développent aussi un projet vélo, même si les pistes doivent être améliorées, notamment en hiver avec la météo et la nuit qui tombe tôt. Enfin, ils travaillent avec Pass Pass pour développer le covoiturage.

Cela fait beaucoup d’opportunités. Comment envisagez-vous la suite ?

Nous traversons une période un peu difficile, avec une fréquentation en baisse et moins d’enthousiasme général. Mais vos outils de communication Cinémas en mouvement vont nous aider à mobiliser le public et à valoriser notre proposition de covoiturage.

Ensuite, vos enquêtes et vos outils de diagnostic vont nous permettre d’avancer avec la collectivité. Nous sommes très preneurs de votre boîte à outils : comment engager concrètement les changements, par quoi commencer, comment s’organiser, comment mettre en place un tarif covoiturage dans un cinéma, comment créer une communauté de covoitureurs… et toutes les actions qui peuvent faciliter la mobilité.

Vous souhaitez donc être un acteur pleinement engagé du projet Cinémas en mouvement ?

Oui. Parce que je connais le réseau de l’Acap, que cela nous permet d’échanger avec d’autres cinémas, de bénéficier des conseils de professionnels et d’un cabinet chargé de l’expertise. Et puis, avoir un soutien technique, tester des outils, être accompagné par l’Acap : c’est toujours très précieux.